Eclats de vers : Article : Finance

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Table des matières

1. Les raisons de l'abandon de l'étalon-or

Contrairement à une idée répandue, l'or et les autres métaux précieux n'ont pas toujours été reconnu comme une monnaie d'échange universelle :

  • l'Égypte antique lui conférait un coté sacré, divin, et le réservait exclusivement aux cérémonies religieuses, et leur système économique, bien que très différent du nôtre, a permis à cette civilisation de prospérer pendant des millénaires
  • certains peuples se servaient de coquilles d'huîtres ou d'autres mollusques pour régler leurs transactions
  • d'autres encore utilisaient des céréales, peaux, dents, plumes, …
  • plus près de nous, le paquet de cigarettes était fort utilisé dans le marché noir des pays de l'est, avant la chute du communisme

Toutes ces monnaies exotiques possédaient en communs ces critères essentiels :

  • il fallait produire un effort de production (pêche, chasse, …) ou un échange pour en obtenir
  • elle était suffisamment abondante pour permettre à l'économie de se développer

Quand on y réfléchit, on voit que ce sont ces conditions qui assurent la stabilité d'un système monétaire : une monnaie gratuite ou trop facilement accessible finit par introduire une hyper-inflation ; à l'inverse, une liquidité insuffisante empêche l'économie de se développer correctement.

Du fait de l'adoption pendant l'antiquité et le moyen-âge des monnaies métalliques (or, argent, cuivre, bronze, …), ce second point posa régulièrement problème au fil de l'histoire : la production des mines ne suffisait plus à alimenter la liquidité de l'économie. Les rois se mirent alors à rogner de plus en plus la part de métaux précieux dans les pièces afin d'en augmenter la quantité et surtout de remplir les caisses de l'état, souvent vidées par les guerres incessantes. Le développement des banques et de leurs produits financiers, ancêtres du billet de banque actuel (lettre de change inventées par les templiers, billets à ordre) apporta également une bulle d'oxygène au système, car une banque prête généralement plus que ce qu'elle n'a en dépôt, ce qui produit un effet multiplicateur sur la masse monétaire.

A partir du 19e siècle, le développement industriel explosif mis de plus en plus en évidence la rareté de l'or par rapport aux besoins en liquidités de l'économie.

Après la guerre 14, l'Allemagne, confrontée à une hyperinflation se vit face à la nécessité de créer une nouvelle monnaie. Certes, il fallait garantir cette monnaie par quelque chose de tangible. Oui, mais sur quoi ? Les réserves en or avaient été vidée suite au paiement exigé par le traité de Versailles. Faute de métaux précieux, ils décidèrent donc que la garantie serait une fraction (6 % des parts) de l'économie elle-même

immobilier, entreprises, mines, production, ... La boucle était

bouclée et la nouvelle monnaie, le rentenmark, fut adoptée aisément par la population.

L'ironie de l'histoire est que cette solution, adoptée comme une rustine, se révèle en fait supérieure à la garantie or, car la valeur des biens économiques, de loin supérieure à la quantité d'or disponible sur la planète, permet une liquidité plus abondante et un développement économique beaucoup plus souple.

Dernier acte, dans les années 70, où il apparaît clairement que la quantité d'or disponible ne répond plus aux besoins économiques : l'étalon or est abandonné par les USA, les changes deviennent flottants.

Aujourd'hui, on peut voir que, contrairement à une idée répandue, c'est la rareté de l'or qui a provoqué sa chute en tant que monnaie. Demain, si le système actuel apparaissait de plus en plus instable, peut-être seront-nous amené à créer un « rentenmark » mondial.

2. La vente à découvert

En ces temps de crise, les boucs émissaires fleurissent à tous les coins de rue, et ces horribles sorciers de vendeurs à découverts figurent en bonne position sur la liste : vilains, pas beaux, ils ont tous les défauts que l'ignorance voudra bien lui prêter.

Car c'est bien de prêt qu'il s'agit : vendre à découvert revient, directement ou indirectement, à emprunter un titre pour le vendre sur le marché, dans le but avoué de le racheter plus tard, et surtout plus bas. Il en résulte donc bel et bien une offre de titres surnuméraire, et il n'en faut pas plus aux démagoges de tous les horizons pour nous sortir des raccourcis et des conclusions simplistes, conclusions relayées par les inévitables perroquets de service et autres volatiles toujours en quête de perches pour se mettre en valeur.

Ainsi, la vente à découvert, ou « vade » comme on dit dans le jargon financier, est responsable de tous les maux : cracks boursiers, crises, récessions, épuisement des matières premières, problèmes écologiques. Qu'on se le dise : la vade est la cheville ouvrière du grand complot international-mondial de l'univers intergalactique ! C'est elle qui alimente les bulles spéculatives, c'est elle qui oblige les banques à prendre des risques inconsidérés sur des marchés illiquides et dérégulés, c'est elle qui est la cause de la dégradation des comptes des sociétés, c'est elle qui, point barre et sans discussion possible !

Trêve de plaisanteries et revenons à la réalité. Ce que les démagogues ne vous disent pas, c'est que cette offre accrue implique également une hausse de la demande. En fait, toute action vendue à découvert est rachetée tôt ou tard, et ce d'autant plus vite que, comme tout emprunt, l'emprunt de titre a un coût. Les intervenants ne peuvent donc pas s'éterniser dans une vade sans voir s'amenuiser leur bénéfice ou se creuser leurs pertes.

Les démagogues ne vous disent pas que plus la demande d'emprunt de titres sera élevée, plus le taux d'intérêt correspondant grimpera, rendant de moins en moins avantageuse une telle opération. La caricature d'un marché constitué presque exclusivement de vadeurs affamés salivant des crocs ne tient pas la route, car les taux pratiqués seraient alors si élevés que la probabilité de gain frôlerait le zéro absolu. Avec des taux élevés, non seulement les détenteurs d'actions ont plus intérêt à prêter leurs titres qu'à les vendre, ce qui a pour effet d'assécher un peu plus l'offre sur le marché au comptant, mais les intervenants ont également tendance à acheter des titres afin de pouvoir les prêter et d'en tirer une rémunération conséquente. Toutes choses inchangées par ailleurs, on assisterait alors à une hausse spectaculaire des cours.

Interdire la vade n'aboutirait donc qu'à diminuer la liquidité des marchés financiers, et par là même à diminuer l'attrait des titres eux-mêmes. On l'a vu récemment, l'interdiction de la vente à découvert des bancaires n'a pas le moins du monde ralenti leur chute, bien au contraire.

Ce qui serait intéressant par contre, ce serait de permettre aux particuliers de prêter aisément les titres qu'ils possèdent, histoire d'arrondir les dividendes.

Si vous voulez vraiment assainir économie et finance, c'est ailleurs qu'il vous faudra chercher. Et si nous parlions des monopoles, des effets de leviers sans limite légale, des mandats cumulés, ce serait plus intéressant que tous ces écrans de fumée.

3. Réponse à l'argument « tu ne vends pas une maison que tu ne possèdes

pas

Une maison n'est pas liquide, ni fongible, tu n'as pas deux baraques pareilles, ce qui n'est pas le cas des titres ou contrats standardisés.

4. La face cachée de l'analyse fondamentale

On en revient toujours au même problème, une action ne peut se valoriser que par des données futures donc inconnues, que ce soit dividendes ou cours, autrement dit elle ne peut pas se valoriser, d'où l'extrême volatilité dont elle souffre.

Le problème du cours présent dépendant du cours futur pose aussi le problème d'auto-référence qui peut provoquer des exagérations à la hausse comme à la baisse.

Sans compter que les actions n'ont pas la même valeur unitaire quand on détient 0,01 % ou 70 % d'une société. Dans le premier cas, le dividende prime, dans le second, c'est le bénéfice puisqu'on sait qu'on pourra le faire sortir de la société quand on le désire.

Le titre qui permet de passer de 49,99 % à 50,01 % est en fait celui qui a le plus de valeur intrinsèque pour le détenteur tout en n'ayant pas d'attrait particulier pour un quelconque petit porteur.

La valorisation générique d'une action n'est donc pas seulement inconnue, elle est inexistante.

Auteur: chimay

Created: 2023-08-23 mer 11:04

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