Eclats de vers : Litera : Galanteries

Index littéraire

Retour à l’accueil

Table des matières

1 Cocktail

Il y faudrait de la glace
Fondante comme un sourire
En langues d’eau qui s’effacent
Vaporisées de désir

Il y faudrait un chalet
Au frigidaire garni
Les chats raffolent du lait
Qu’on leur verse dans le nid

Il y faudrait une chambre
Discrète à double vitrage
Qu’on soit les seuls à entendre
Nos culbutes de sauvages

Il y faudrait de la fièvre
Et se noyer de sueur
A la fraîcheur de nos lèvres
Pour condenser la vapeur

Il y faudrait des calmants
A pleins tubes d’endorphine
Pour apaiser nos tourments
Quand l’aurore s’endort fine

Il y faudrait quelques nuits
Au moins pour tout consommer
Et l’or logé en circuit
Pour pouvoir recommencer

Il y faudrait de ces fruits
Juteux pour désaltérer
Et recharger sur le lit
Nos batteries épuisées

Il y faudrait la pulpeuse
La tendre pêche sanguine
De la houle langoureuse
Et beaucoup de vitamines

Il y faudrait ces soupirs
Ces pulsions dans ta poitrine
Aiguillons à assouvir
Pointant sous la mousseline

Il y faudrait de l’encens
Pour corrompre le brouillard
Qui nous coule dans le sang
Comme un poison doux et noir

Il y faudrait des salés
Pour attiser notre soif
Et flamber dans le foyer
Les réserves de cognac

Il y faudrait des frissons
Pour que vibre le sommier
Pour secouer au tison
Le mélangeur échancré

Il y faudrait quelque lien
Pour tordre l’espace-temps
Et que mousse le chemin
Jusqu’au point d'égarement

2 Alternative

Te prouver mon amour autrement qu’en je-t-aimes
Te prouver, mon amour, que l’amour qui nous lie
Est plus fort est plus beau que trois mots qui frétillent
Dans le doute et la peur de nos mains qui s'étreignent

Qu’il ne reste qu’un souffle aux bougies qui s'éteignent
Et un parfum d’encens pour allonger la nuit
Qu’il ne reste qu’un souffle un peu rauque un peu gris
A l’aurore attendrie dont le rire nous baigne

Te prouver qu’un serment vaut bien moins qu’un instant
Quand je le passe en toi à célébrer la vie
Jusqu’aux petites morts dont on renaît plus grand

La seule vérité est l’alcôve où l’on crie
La seule éternité est celle que l’on prend
Ne la réduisons pas à ces mots inconstants

3 Contact

Quand les mots n’ont plus cours reste la poésie
Elle est seule à pouvoir retranscrire à distance
Tout ce que l’on ressent à rêver d’une fille
Et à transmettre intacte une ardeur lancinante

Aussi quand deux beaux yeux vous regardent : silence !
Ne lui dites plus rien mais écrivez-lui tout
Vos fantasmes cachés vos désirs les plus fous
Et la brûlure au sang que vous crée l’abstinence

De ne pouvoir enfin la serrer dans vos bras
De ne pouvoir enfin la couvrir de vos mains
Et la border d’amour à l’abri de vos draps

Quand vient le souffle court reste un vers de satin
Un sonnet tout en soie qui frôlera ses seins
Et la caressera du haut jusques en bas

4 Vent d'anges

Sers à boire l’amour je vide la bouteille
Le tonneau de ta peau surtout s’il est sans fond
Sers à boire l’humour et n’oublie pas la treille
Les grappes alourdies geignent sous la pression

Allons tâter les fûts que cache ton jupon
Pour voir si l’un d’entre-eux peut être mis en perce
Ne feins pas l’ingénue et retrousse ta herse
Veux-tu un peu de feu ? J’allume la passion

Je veux la voir fumer dans ces yeux qui me bercent
Comme une averse chaude aux braises d’un soupir
C’est un cru bien trempé le vin que tu nous verses
Lever ton cotillon relève mon désir

Ta chair de satin rose enflamme le saphir
Il n’y a plus qu’un pas de la coupe à nos lèvres
Sens-tu le narguilé tourbillonner de fièvre ?
La cuvée est tirée buvons sans tant languir

5 Décalage

Je te l'écrirai le seize
Loin des flopées de cuicuis
Nous attendrons que s’apaisent
Les trafiquants de grigris

Envolez-vous confettis
Et petits coeurs de papier !
Les cocottes dépliées
Ne vous ont donc rien appris ?

La poule aux oeufs d’or est lasse
De nidifier le quatorze
La fleur s'étiole et s’efface
Quand l’escroc griffe l'écorce

Bouton de robe et de rose
Attends un peu pour t’ouvrir
Je ne veux pas que l’eau rose
Se mêle à l’eau du désir

Inonde-toi de patience
Lune de ciel océane
Ta lingerie alléchante
En deviendra diaphane

C’est tout l’art et la science
Que nous enseigne l'éclair :
Electriser l’atmosphère
Avant d’entrer dans la danse

C’est dans des bois plus discrets
Plus langoureux moins précoces
Que l’on murmure en secret
Les biens en chair et en noces

Et ce sera quitte ou trouble
La toile évadée du cadre
Nos lèvres verseront double
Le feu échappé de l'âtre

On prend mieux son contre-pied
En décalant les audaces
Le savoir-faire l’impasse
S’applique au calendrier

Foin des piscines moroses
Des jacuzzis grand écran
Où l’onde vague s’est close
Depuis plusieurs nuits du temps

Je te l'écrirai le seize
Loin de la meute du quinze
Qui pour éviter le treize
Nous assourdit de syrinx

6 Vers galants

Couvrez-vous, chère amie, je ne réponds de rien
Si pendant cette oeillade enflammée qui va suivre
Vous laissez l’air de rien le galbe de vos seins
Naître et s'épanouir sous mes yeux qui s’enivrent

Si vous ne rentrez pas, bergère, vos tétons
La nuit nous sera courte à nos ébats bien longs

Couvrez-vous, alouette, où je vais déplumer,
Une à une effeuiller les grappes de vos vignes
Pour m’en aller nicher dans la rose dorée
Qui depuis ce matin semble me faire signe

Si vous ne rentrez pas, bergère, vos tétons
La nuit nous sera courte à nos ébats bien longs

Couvrez-vous, demoiselle, et fermez vos pupilles
Ou je plonge dedans ! Et ton sourire en coeur
Où flotte cet aveu de notre amour qui brille
Garde-toi qu’il se fonde en rire tentateur

Si vous ne rentrez pas, bergère, vos tétons
La nuit nous sera courte à nos ébats bien longs

Votre robe, voyez, ne tient plus qu'à un fil !
Un bien pâle verrou pour garder vos trésors :
Il suffit d’un soupir et d’une main habile …
Dois-je entendre que vous me cédez votre corps ?

Si vous ne rentrez pas, bergère, vos tétons
La nuit nous sera courte à nos ébats bien longs

Couvrez-vous, gente dame, il est temps, choisissez !
Le désir me lancine et mon clin d’oeil s’achève …
Bien, vous l’aurez voulu, vos draps seront froissés,
Je m’en vais vous couvrir de votre tenue d'Eve.

7 Ablutions

Elle était bain-douche
Je suis plutôt mousse
Nous prîmes pour couche
L’abri d’un bain-mousse

Je me nommai mousse
De sa jolie bouche
Baisai à la louche
Sa jolie frimousse

Elle prit la mouche
Mais bouderie douce
Je vis dans sa mouche
Un rire qui mousse

Un sourire en couche
Déjà jeune pousse
Arrosant la brousse
D’une fraîche souche

La savane rousse
S’incline et se couche
Un frisson de frousse
Nous frôle et nous touche

Docile et farouche
Son souffle éclabousse
Ses lèvres qui gloussent
D’un air des plus louches

Caressant mon pouce
D’autres diraient gousse
Ah mais vos yeux louchent ?
Rideau sur la douche !

8 Trottinette

- Ton sourire est sursis
Sous tes sombres sourcils
Aurais-tu un souci
Ma souris qui trottine ?
Tu ne peux me l'écrire
Ni même le décrire
Mais je ne peux souscrire
A ce qui te chagrine

- Mes excédents me lassent
Je suis dans la mélasse
Mes rondeurs fuient la glace
Vise ma silhouette
Je ne peux plus si vite
En jolie marguerite
M’approcher des guérites
Me la jouer coquette

- Ah ça si tu déprimes
Il faut que tu l’imprimes
Sur quelque rythme en prime
Qui te ferait danser
Pour guérir du syndrome
Et retrouver ses chromes
Rien de tel que le baume
Qu’on appelle chanter

- Mais j’ai l’aphone éthique
Je perds la phonétique
Dans ce champ de colchiques
De charmeuses à larmes
Tu sais l’arbre au riz colle
Plaisirs arboricoles
Qui faussement décollent
En de fausses alarmes

- Aies confiance en un chat
Paresseux et pacha
Ne fait pas tout un plat
De tes fruits généreux
J’hésite à déguster
Ou bien me délecter
Savourer dévorer
Tes appas onctueux

- Rentre ces mots grivois
Propre des chats gris vois
Je ne suis pas de bois
Je sais que tu me daubes
Sais-tu que je me cambre
Je plie sous le gingembre
Quand vient geindre en ma chambre
La fontaine de l’aube

- J’admire votre coffre
Qui gonfle sous l'étoffe
L’inspiration étoffe
Votre joli cou lisse
Crois-tu que les dés pensent
Quand les corps se dépensent
En folles récompenses
A l’abri des coulisses ?

- Cher ami je présume
Que votre soif écume
Tous les ports où l'écume
Est douce et virevolte ?
Gardez donc vos secousses
Je ne suis de ces housses
Si légères qu’on trousse
D’une aile désinvolte

- Je sens comme un vent pire
Que celui des vampires
Souffler en ton empire
Range tes incisives
Aux sangsues alitées
Prendre autant que donner
De sensualité
Oui telle est ma devise

- Ne sois pas si ballant
Le jeu de go est lent
Passons au goéland
Mon sommeil se délabre
Ta réplique est cinglante
Et je reste sanglante
Le feu ardent au ventre
Sans même un candélabre

- Ni homme ni présence
Tu veux l’omniprésence
Nous rouler dans la danse
Mais sans en avoir l’air
Tu me parles maquette
De flamber la moquette
Ou d’attiser la couette
Sans sauter de barrière

- Tout cela reste à voir
Si l’on ne peut savoir
Alors autant s’avoir
Autant que je fléchisse
- Veux-tu que je m’enflamme ?
- Que mon corps te réclame ?
- Que ma chanson t’acclame ?
- Que je te réfléchisse ?

9 Adamantine

Elle est fauve et féline et son corps de panthère
Se fond dedans les flots agités de la nuit.
Seuls, un reflet de lune et d’enivrants yeux verts
Dénudent ma vénus allongée sur le lit.

Le piège est bien tendu mais qui me pensait pris
Se retrouve captive emmêlée dans ses tresses.
Un baiser velouté, de contre-danse épris,
Coule au creux de mes mains les clefs de leur maîtresse.

Dans un rire soumis tout autant que vainqueur,
Elle se fait brebis tour à tour et tigresse ;
Nos sauvages douceurs libèrent la liqueur
Des chaudes voluptés, des tendres allégresses.

Elle est au jeu d’amour une insatiable ogresse
Mais je la prise ainsi, feulant dans la litière,
Jusqu'à l’aube écrémée où les rais de lumière
Se posent sur les cils de ma charmante hôtesse.

M’agripperai-je à vous chatoyante crinière,
Aux guirlandes de fleurs du saule guilleret ?
A travers le rideau, irai-je au nid douillet
Qui dans l’obscurité couve quelque mystère ?

Ondoyante toison, frontière de l’azur,
Sur sa peau satinée ruisseaux aux cours distraits
Qui sillonnez sa gorge et ses pulpeux attraits,
Laissez ce chant sur vous étendre son murmure !

10 La muse inquiète

- Dis-moi mon jeune ami avec qui je partage
L’essence et la douceur de tant de douces heures
Où nous volons tous deux d’éclaircies en orages

Espérant dieu sait quel improbable rivage
Mon frère mon amant - mais suis-je bien ta soeur ? -
Avec qui quand l’envie nous y convie je couche

Sur un lit de vélin nos fiévreuses langueurs
Notre souffle commun transmis de bouche à bouche
Tout ce qui en un mot nous donne le vertige

Dis le moi s’il-te-plaît dis le moi je t'écoute
Pourquoi ? Je veux savoir ! que dis-je je l’exige !
Pourquoi la dédaigner ? Une aussi jolie fille ?

Je l’ai vue comme toi cette poupée érige
Sûrement bien des feux qui l’appellent chérie
Elle a le teint si frais et ses joues sont si roses

Qu’on dirait un dessert orné de sucreries
Ne serait-ce cet air hautain de porte close
Si je n'étais inquiète oui je serais jalouse

Car enfin je le sais quand tu vis cette chose
Tu as montré autant d'émotion qu’une arbouse
Certes connaissant bien ton goût des petits fours

Je ne m’attendais pas à ce que tu l'épouses
Je te sais préférer au marbre le velours
Mais de là à bâiller devant si belle proie

Aurais-tu attrapé quelque chagrin d’humour ?
Devrais-je te soigner de mon nectar de roi
Ou t’enseigner l’ardeur qui bouillonne en mes veines ?

M’instruiras-tu comment ? Me diras-tu pourquoi ?
- Je me le suis aussi demandé sois sereine
La raison la voici fais taire ces alarmes

C’est que de ses yeux secs ne coule aucune larme
Beaux oui comme il convient c’est là tout le problème
C’est qu’elle a de l'éclat … sans avoir aucun charme

Accueil

Auteur: chimay

Created: 2021-11-07 dim 19:09

Validate